Histoire D : La Nouvelle-Crystal
ou "La Grande Catastrophe"
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Fiche n° 00029143-GXDFY-7321-BW68.
Emplacement : Historithèque de l'Espace Humanifié (HEH).
Date : 8 H.5653 (8ème jour de l'année 5653 de l'Humanification).
Source : département civilisations terrestres.
Auteur : Soven Lahiri - documentaliste.
Titre : La Nouvelle-Crystal.
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On se demandait encore comment la Coalition avait pu disparaître ainsi, après plus de trois mille années de stabilité universelle…
La déchéance insidieuse et sous-jacente s'était révélée d'un coup, le jour où la Terre s'était éteinte définitivement, disparaissant dans les explosions dévastatrices et meurtrières et sous les retombées de poussières toxiques en tout genre : « La Grande Catastrophe » n'avait rien laissé, ni personne pour s'en rendre compte.
Nulle vie n'avait survécu à la plus effroyable des manigances humaines de tous les temps. Rien pour se protéger, rien pour survivre… Le sol n'était plus que silice souillée, observable sous toutes ses formes connues et partout où le regard pouvait essayer de se poser dans ce désert informe.
H.3154 : l'an trois mille cent cinquante quatre de l'Humanification.
La fin du monde.
Les spectateurs de toutes les colonies Solaires avaient été aux premières loges de l'éclat dix fois plus éblouissant que le Soleil lui-même. Ce halo aveuglant avait enveloppé la Terre en quelques courtes secondes et avait duré trente-sept longues minutes. Ceux qui avaient réchappé à la cécité instantanée et aux brûlures irréversibles, avaient finalement péri dans l'immense nuage de radiations qui avait diffusé à partir de l'ensemble de tous les points "zéro" de manière centrifuge, sans laisser la moindre chance à la moindre bribe de vie présente aussi bien sur la planète-mère que dans les colonies proches. Un véritable champ de ruines pulvérisées et contaminées avait remplacé toutes les merveilles du patrimoine universel recensé à la surface du berceau de l'humanité. La gouvernance de la Coalition était décapitée. Rien de subsistait.
Les mondes extérieurs avaient bien sûr continué de vivre normalement, mais plus rien ne les avait poussés à rendre des comptes à qui que ce soit. Chacune des colonies extrasolaires s'était prise en main, sans attendre qu'un candidat potentiel à la succession se fit connaître.
Rien ne pourrait plus jamais être pareil, la Terre avait bel et bien été le centre du monde, tel que l'avait décrit les philosophes de l'antiquité… jusqu'à ce triste jour.
L'univers humanifié n'avait plus de conscience… seule l'habitude confortable et résignée des humains non concernés directement par « La Grande Catastrophe », une espèce de cortex cérébral, ce fameux cerveau primitif, continuait à envoyer ses impulsions vitales essentielles pour seulement maintenir un métabolisme basal de l'entité humaine éveillée à travers le cosmos. En dehors du système Solaire dévasté, les échanges commerciaux avaient donc perduré sans faire de vague, le train train quotidien avait persisté par automatisme, mais la morosité avait malgré tout gagné tous les peuples disséminés dans les étoiles de la Voie Lactée et de ses spirales voisines ainsi que celles des amas galactiques proches.
Quoi qu'il en soit, le système Solaire fut décrété zone interdite et placé en quarantaine en attendant qu'on comprenne ce qu'il était arrivé aux Terriens. La contamination des sols, des atmosphères et de l'espace interplanétaire s'étendait dans toute la région du Soleil des origines. Des expéditions scientifiques regorgeant de spécialistes réputés et d'experts très hautement qualifiés, équipés d'un matériel aussi élaboré que coûteux, sillonnèrent le secteur entier, fouillant tous les recoins, explorant la plus petite interstice du moindre caillou qui supportait le plus humble refuge spatial perdu loin de la première station coloniale (anciennement) habitée. Ils ne trouvèrent que systèmes inopérants, désolation et cadavres momifiés ou en état de putréfaction avancée selon la composition du milieu ambiant.
L'explication cherchant dans un premier temps à mettre en lumière un éventuel suicide collectif, ne passa pas au travers des premières investigations et ne fut pas en définitive le résultat de l'enquête. Cela ne pouvait être. Les gens n'avaient pas poussé les boutons rouges sous l'emprise idéologique d'une politique, d'une secte ou d'une quelconque religion qui prônait l'Apocalypse. Alors quoi ? Un virus inconnu, indécelable et foudroyant, peut-être ? Une anomalie génique spontanée qui aurait infesté l'ensemble des génomes de toute la population pour la pousser vers un autodafé salvateur ? Un nuage empoisonné à la constitution moléculaire inédite, plus ou moins hallucinogène, qui aurait parcouru en un rien de temps toute la surface de la planète, allez savoir ? Une expérience biologique ou chimique qui aurait mal tourné, pourquoi pas ?
Non et non ! Rien de plus qu'un coup de folie de l'homme - un de plus, me direz-vous - mais cette fois il s'était agi de l'ultime méfait des Terriens… leur dernier coup de maître.